rien de nouveau!

C’était affiché en grand sur son front dès l’instant où je l’ai vu, ce premier jour, quand il m’est apparu à dix centimètres du bout de mon nez, là, c’était écrit en grand : « tu vas tomber amoureuse de moi ».

Yavait pas marqué "prend garde", "attention"  nan...c'était affirmatif, presque déja révolu.

Ses grands yeux noirs le disent à qui veut l’entendre, il suffit de poser ses yeux sur lui.

Oui mais moi j’ai voulu faire ma fière, « il est bête, il est nul, il a que son physique pour lui, c’est bon, j’peux me tenir ! »

Ouai….faire ma fière et continuer de papoter avec lui à tout va, le laisser venir….le laisser parler, apprendre à le connaître et changer d’avis...et puis tomber.

Voila.

Pouf.

Parce qu’il n’est que ce à quoi il ressemble. Pas besoin d’aller chercher plus loin. Il se donne des airs et on y croit, on le laisse faire son show pour finalement comprendre qu’il est simplement tout ce que j’ai vu en lui la première fois. Ce petit homme perdu au milieu de la foule…qui regarde le monde pour trouver ce qui lui faut, qui cherche sa route… mon prince charmant.

Il est moi en mec.

Il a l’air de ce que j’attendais.

J’ai besoin d’avis éclairés. Besoin de savoir ce qu’un esprit objectif pourrait déduire d’un comportement que je ne cesse de vouloir comprendre.

Lundi était le début d’une semaine qui s’annonçait moyenne. Deux exams, les premiers d’une série à venir, et puis surtout, le retrouver. J’avais passé le week end à me foutre des noeuds dans la tète, a m’apitoyer sur mon sort, il devait aller voir sa meuf a Reims.

Vous vous souvenez peut être d’une phrase que j’avais retranscrite une fois

« j’me suis bourré la gueule et j’ai serré une meuf »

Vous vous rappelez, cette phrase élégante qui m’avait cassé mon délire pour un temps. Bah, c’est avec qu’il sortait. Quand il avait dit qu’il avait une meuf je m’étais dit que c’était une histoire de longue date, l’amour de sa vie, une Topmodel fille, qui irait super bien avec… en fait nan, il sortait avec elle depuis un mois et quelque, et il l’avait connu après moi ! nah

Quand à savoir si elle était belle, aucun moyen de le savoir sans lui demander, mais de toute façon, c’était logique pour moi. Mon topmodel pouvait pas sortir avec un thon, et puis quoi encore (c’est bien pour ça qu’il pouvait pas sortir avec moi).

La semaine dernière j’avais saisi des infos au passage, elle le harcelait depuis deux semaines pour qu’il vienne la voir, et puis à l’entendre, s’il avait une meuf ce n’était pas pour rien, alors autant la calmer et puis hein…voila quoi. Donc il avait convaincu sa sœur de lui prêter la voiture, et pour le coup, il  ramenait deux meufs de son groupe qui habitaient aussi à Reims. Deux moches avec qui j’avais sympathisé a la bu quand il était venu s’asseoir a coté de moi, posée là depuis une heure, qui demandait rien à personne avec mes livres de photos et mes croquis de toute la populas qui m’entourait. J’avais ma musique dans les oreilles et mes crayons éparpillés autour de moi, et pouf il s’est flanqué à coté de moi avec ses deux groupies, finalement gentilles. Comme toutes ses groupies à ce que j’ai constaté. On est toutes solidaires peut être…

A chaque fois qu’il arrive à la bu et qu’il est avec des meufs, il vient s’asseoir à coté de moi, donc les autres aussi, du coup elles discutent avec moi, et c’est là que je me rend compte que ça sert çà rien d’être jalouse d’elles.

Et il fait ça tous les jours. J’ai élu domicile a la BU, et apparemment lui aussi. La plupart du temps on se retrouve tous les deux. En fait, ça évolue avec le temps. Au début, dans les premières semaines c’était exceptionnel, je venais vers lui timidement en lui demandant si je pouvais m’installer à copté de lui parce que malheureusement y’avait plus de place ailleurs. En fait, j’étais avec Julie, je passais une heure dans le rayon a regarder vers lui a travers les étagères « j’y vais, j’y vais pas…. »

Ensuite, c’est lui qui a pris confiance et qui est venu régulièrement se poser a ma table. C’est là que j’ai décidé de fréquenter assidûment la Bu, qui m’est apparu comme un lieu propice à l’évolution de nos relations. On a pris l’habitude d’y venir ensemble après les cours, puisqu’à s’asseoir ensemble a la BU, on s’asseyait ensemble aussi en cours tant qu’à faire, et puis on traînait ensemble en ville aussi tant qu’à faire…. et puis voila : maintenant on passe nos journée a la bu…a ne rien faire, ou si, a feuilleter les livres, tourner frénétiquement les pages entre deux mots échangés et quelques regards… une vanne…un sourire.

Et puis tous les jours quand on se croise, « tu vas a la bu ? »

Je sais que quand je suis avec lui je ne fou rien, pas moyen de me concentrer. Alors en feuilletant les bouquins que je chope pour avoir quelque chose à faire je l’observe, j’écoute ce qu’il dit, je le regarde, je l’épie, j’apprend à le connaître. Deux mois pour le connaître.

J’ai bien vu qu’il ne foutait rien non plus. Il étale ses cours devant lui, et les relie.

Tous les jours pendant deux heures je tourne des pages, et il relie les cours qu’il vient de suivre.

Ce week end donc je l’imaginais avec sa meuf, en amoureux dans les rues de Reims… il devaient aller au ciné. Je pensais qu’il passerait le week end avec elle. Qu’il rentrerait en catastrophe à Lille le dimanche soir, complètement dans son trip, ayant totalement oublié mon existence.

Alors j’avais pris des mesures d’autoprotection : esquivage. Oui encore.

Toutes les semaines je lance le plan esquivage, et toutes les semaines je reste avec lui. Je me dis que si j’ai la possibilité de rester avec lui c’est aussi qu’il me laisse faire.

Oui mais chaque dimanche en partant, quand je ferme les yeux dans le tgv, que j’imagine la semaine à venir, une chose m’apparaît clairement : garder une distance de sécurité avec Topmodel.

Lundi il m’a emmené à la bibliothèque de l’ufr, et puis comme il se faisait tard et qu’il avait sa voiture, il m’a proposé de me ramener. « Demain tu quittes à onze heure ? » « ouai » « ok, on se retrouve a la BU »

Cette fois ci c’était prévu de la veille, je devais lui faire un compte rendu du partiel d’où je sortait et ou il devait aller. Ce qui était totalement inutile puisqu’on n’aurait pas le même, et qu’il avait fait des exos de préparation durant la semaine. Je l’ai trouvé quand je suis sorti de ma salle, la rétine encore teintée par la lumière de la diapo. Je suis sortie la première et je me suis retrouvé face à lui, appuyé contre le mur. « Alors ??! » « aloo..r…euh… »

On feuilletait des gros livres pleins de tableaux, pour s’imprégner du style propre à chaque artiste et savoir reconnaître n’importe quelle œuvre de n’importe lequel d’entre eux. de Cimabue à Giotto en passant par Duccio et Fra Angelico, on avait passé l’aprem de la veille à les ressasser, et maintenant que j’étais délivré de mon partiel, c’était a lui de taffer. On avait une heure. Je m’étais emparée de trois bouquin et je cachais le titre et l’auteur avec ma main en prenant n’importe quelle œuvre au pif « et ça ? C’est qui ? »

« heuu..Giotto !!!! heu nan !!! heuu !!! Fra !! nan ! Piero !!! … »

« nan…. Duccio….arf, elle était dure celle la…je change… »

Il commençait à se ronger les ongles et à secouer son pied….

« hey ? T’inquiète ça va aller… »

Et puis il me fait

« J’ai cassé avec ma meuf. »

« ah ouai ? » (la surprise m’a empêché de prendre le ton dramatique que j’aurai voulu avoir)

« ouai ce matin » il rigolait.

« ah… » (Là déjà j’avais eu le temps de saisir l’info et j’avais déjà plus l’air de compatir…bon bien sur il avait pas l’air bouleversé…mais bon)

Il disait que ça le faisait chier parce qu’elle disait qu’il s’était foutu de sa gueule et c’est bien pour ça qu’il cassait, pour pas qu’elle continu de s’enflammer. Faut dire qu’ils s’étaient vu deux fois dans leur vie, je comprend qu’il veuille calmer ses ardeurs.

La veille j’avais essayé de pêcher quelques infos sur sa meuf. Si j’avais voulu, il m’aurait raconté sa vie en long en large et en travers…mais j’en étais resté à sa description. Il m’a dit qu’elle était plutôt grande, qu’il avait l’habitude de sortir avec des petites, et puis qu’elle était folle de lui, ce qui le saoulait étant donné que ce n’était pas réciproque. Fatal error de déclarer sa flamme a un gars qui se fou éperdument de toi.

Bref, j’allais mieux, mes angoisses du week end n’étaient pas fondées. A ce moment là je ne savais pas qu’il allait casser avec elle le lendemain. A ce moment là j’étais contente de le retrouver. On était posé à la bibli, on chahutait dans les rayons, on se faisait des quiz… le soir quand il m’a ramené en voiture j’étais encore pleine d’image de lui dans la tète. Quand on marchait derrière la fac tous les deux dans la nuit, je me disais qu’on était bien ensemble.

Mais vous savez quoi ?

J’avais pas envie qu’il casse avec sa meuf. Parce qu’elle me servait d’excuse. J’avais le temps de me rapprocher de lui, il ne la voyait qu’une fois toute les deux semaines et encore, alors que je le voyais tous les jours… Maintenant j’ai peur qu’il trouve un autre meuf plus proche de lui, plus belle…une autre qui l’éloigne de moi…

S’il trouvait une meuf à Lille, il resterait avec elle après les cours…il irait dans la grande roue avec elle, et on irait plus se promener tous les deux dans Lille…. Il écrirait des messages mielleux en amphi et je mourrai de jalousie, et il ne rigolera plus avec moi des conneries que lui envoyait sa meuf…il me les lirait plus, il se contenterait de répondre en souriant…

Maintenant je me demande chaque jour s’il n’en a pas trouvé une autre, s’il faut que je lui saute dessus vite, au risque de tout foutre par terre, pour ne pas risquer qu’une autre me le vole. Il sort souvent avec ses potes, et je sais qu’il kiffe tout ce qui ressemble a une meuf. Je sais qu’il est super beau et qu’il peut avoir n’importe laquelle, et je sais aussi que même sans rien faire n’importe laquelle lui saute dessus. Donc maintenant voila… il a plus de meuf, et donc, je redoute le moment ou il va m’annoncer qu’il en a trouvé une autre. Qu’il aura peut être des étoiles dans les yeux….

Il pense à moi, je le vois, je le sens, je le sais
Et son sourire ne ment pas quand il vient me chercher
Il aime bien me parler des choses qu'il a vues
Du chemin qu'il a fait et de tous ses projets

Je crois pourtant qu'il est seul et qu'il voit d'autres filles
Je ne sais pas ce qu'elles veulent ni les phrases qu'il dit
Je ne sais pas où je suis, quelque part dans sa vie
Si je compte aujourd'hui plus qu'une autre pour lui

Il est si près de moi pourtant je ne sais pas comment l'aimer
Lui seul peut décider qu'on se parle d'amour ou d'amitié
Moi je l'aime et je peux lui offrir ma vie
Même s'il ne veut pas de ma vie

Je rêve de ses bras oui mais je ne sais pas comment l'aimer
Il a l'air d'hésiter entre une histoire d'amour ou d'amitié
Et je suis comme une île en plein océan
On dirait que mon coeur est trop grand

Rien à lui dire, il sait bien que j'ai tout à donner
Rien qu'un sourire à l'attendre à vouloir le gagner
Mais qu'elles sont tristes les nuits
Le temps me paraît long et je n'ai pas appris
À me passer de lui